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LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

À quelques pas de là, M. d’Alluye, le front appuyé sur sa main, semblait rêver ; quand Lauzun parut, il se leva précipitamment.

Le duc de Roquelaure et le prince de Monaco examinaient Lauzun dans un silence recueilli, mais où l’ironie se faisait jour. Ils étaient deux, et Lauzun n’avait qu’un témoin.

L’échange malicieux de leurs regards fut loin d’échapper au comte, qui reprit aussitôt :

— Pardonnez-moi, monsieur de Roquelaure, de n’avoir point amené avec moi un maréchal de France, comme M. d’Humières, pour que les choses fussent égales. Je n’ai, continua-t-il en montrant Barailles, que ce brave officier qui m’a suivi dans ma disgrâce. Monsieur le duc et monsieur le prince m’excuseront.

Roquelaure se pencha à l’oreille du prince de Monaco, et lui dit :

— Vous le voyez, c’est un homme en pleine disgrâce. Nous amener ici un simple officier, un gaillard sorti franchement de Pignerol. Ah ! il a affaire à un rude jouteur, et je tremble pour le sang des Pégullin !


IX

LE DÉPÔT.


M. d’Alluye avait mis son habit bas, Lauzun en fit autant, il avait à sa chemise un diamant de la plus belle eau.

Les chuchotements de Roquelaure et de Monaco l’avaient piqué, une noble fureur brillait dans ses yeux, mais trop courtisan pour ne pas cacher son dépit, il fit un pas vers le duc de Roquelaure.

— Mon cher maréchal, lui dit-il à voix basse, j’ai un service à réclamer de votre obligeance.

— Lequel, monsieur le comte ? demanda Roquelaure d’un ton de déférence hypocrite.