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CHAPITRE XXV.

sons vagues. L’existence du citoyen est entourée d’incertitude ; et les corps politiques tombent dans une léthargie funeste, qui les conduit insensiblement à leur ruine.

Chaque citoyen peut faire tout ce qui n’est pas contraire aux lois, sans craindre d’autres inconvéniens que ceux qui peuvent résulter de son action en elle-même. Ce dogme politique devrait être gravé dans l’esprit des peuples, proclamé par les magistrats suprêmes, et protégé par les lois. Sans ce dogme sacré, toute société légitime ne peut subsister long-temps, parce que c’est la juste récompense du sacrifice que les hommes ont fait de leur indépendance et de leur liberté.

C’est cette opinion qui fait les âmes fortes et généreuses, qui élève l’esprit, qui inspire aux hommes une vertu supérieure à la crainte, et leur fait mépriser cette misérable souplesse qui approuve tout, et qui est la seule vertu des hommes assez faibles pour supporter constamment une existence précaire et incertaine.

Que l’on parcoure d’un œil philosophique les lois et l’histoire des nations, on verra presque toujours les noms de vice et de vertu, de bon et de mauvais citoyen, changer de va-