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DES DÉLITS ET DES PEINES

chemin, qui commet des vols en troupe, est tout aussi voleur que quand il vole seul ; et une nation qui fait une guerre injuste, n’est qu’une grande bande. Quand vous aurez employé votre peuple à piller les Hollandais, est-il étrange que la paix mettant un terme à ce brigandage, ils continuent chez eux le même métier, et se volent les uns les autres ? Partout où les Anglais s’établissent, soit chez eux, soit au loin, la piraterie, comme l’appellent les Français, ou si l’on veut, le métier d’armateur, est leur unique but. On prétend qu’il n’y eut pas moins de sept cents armemens dans la dernière guerre. Ils furent faits par des négocians anglais, et cela pour piller d’autres négocians qui ne leur avaient jamais fait aucun mal. Est-il probable qu’il y eût un seul de tous ces armateurs, si prompts à dévaliser les marchands d’Amsterdam, qui n’eût fait la même opération sur son voisin de Londres, s’il eût pu se flatter de le faire avec la même impunité ? C’est la même avidité, c’est toujours l’alieni appetens ; il n’y a que la crainte et le risque du gibet qui les différencie. Comment donc une nation qui compte tant de voleurs d’inclination parmi ses citoyens les plus honnêtes, et dont le gouvernement encourage et délivre des commissions à sept cents bandes de ces sortes de voleurs, comment une telle nation a-t-elle le front de condamner ce crime dans les individus, et d’en faire pendre une vingtaine dans une matinée ? Ceci rappelle