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Page:Beccaria - Des délits et des peines, traduction CY, Brière, 1822.djvu/335

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Les médecins cherchèrent encore la marque satanique. Ils la trouvèrent à un petit seing noir, sur une de ses cuisses. Ils y enfoncèrent l’aiguille. Les tourmens de la question avaient été si horribles, que cette pauvre créature expirante sentit à peine l’aiguille ; elle ne cria point : ainsi le crime fut avéré. Mais comme les mœurs commençaient à s’adoucir, elle ne fut brûlée qu’après avoir été pendue et étranglée.

Tous les tribunaux de l’Europe chrétienne retentissaient alors de pareils arrêts. Les bûchers étaient allumés partout pour les sorciers comme pour les hérétiques. Ce qu’on reprochait le plus aux Turcs, c’était de n’avoir ni sorciers ni possédés parmi eux. On regardait cette privation de possédés, comme une marque infaillible de la fausseté d’une religion.

Un homme zélé pour le bien public, pour l’humanité, pour la vraie religion, a publié dans un de ses écrits en faveur de l’innocence, que les tribunaux chrétiens ont condamné à la mort plus de cent mille prétendus sorciers. Si on joint à ces massacres juridiques, le nombre infiniment supérieur d’hérétiques immolés, cette partie du monde