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DES DÉLITS ET DES PEINES.

rain, qui représente la société même, ne peut que faire les lois générales, auxquelles tous doivent être soumis, mais qu’il ne lui appartient pas de juger si quelqu’un a violé ces lois.

En effet, dans le cas d’un délit, il y a deux parties : le souverain, qui affirme que le contrat social est violé, et l’accusé, qui nie cette violation[1]. Il faut donc qu’il y ait entre

  1. Dans les états monarchiques, le prince est la partie qui poursuit les accusés, et les fait punir ou absoudre ; s’il jugeait lui-même, il serait le juge et la partie. Dans ces mêmes états, le prince a souvent les confiscations ; s’il jugeait les crimes, il serait encore le juge et la partie. (Montesquieu, de l’Esprit des lois, liv. VI, chap. 5.)

    — « Le souverain assure en général, que, par tel fait ou dans tel cas, le contrat social est violé, mais il n’accuse point de ce fait l’homme qu’il s’agit de juger ; et lors même que la partie publique porte plainte, elle ne fait que demander qu’on informe. L’accusateur est celui qui affirme qu’un tel a commis telle action. L’auteur a reconnu lui-même que la règle du juste et de l’injuste est pour le juge une simple question de fait. Il a dit aussi que les décrets sont toujours opposés à la liberté politique, lorsqu’ils ne sont pas une application particulière d’une maxime générale. Il y a donc trois choses à distinguer ici : la maxime que le souverain établit, le fait particulier que l’accusateur affirme, et l’application