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CHAPITRE IV

plus les citoyens soumis au joug d’une multitude de petits tyrans, d’autant plus insupportables, que la distance est moindre entre l’oppresseur et l’opprimé ; d’autant plus cruels, qu’ils rencontrent plus de résistance, parce que la cruauté des tyrans est proportionnée, non à leurs forces, mais aux obstacles qu’on leur oppose ; d’autant plus funestes, qu’on ne peut s’affranchir de leur joug qu’en se soumettant au despotisme d’un seul.

Avec des lois pénales exécutées à la lettre, chaque citoyen peut calculer exactement les inconvéniens d’une mauvaise action ; ce qui est utile, puisque cette connaissance pourra le détourner du crime. Il jouira avec sécurité de sa liberté et de ses biens ; ce qui est juste, puisque c’est le but de la réunion des hommes en société.

Il est vrai aussi que les citoyens acquerront par là un certain esprit d’indépendance, et qu’ils seront moins esclaves de ceux qui ont osé appeler du nom sacré de vertu la lâcheté, les faiblesses et les complaisances aveugles ; mais ils n’en seront pas moins soumis aux lois et à l’autorité des magistrats.

De tels principes déplairont sans doute à ces despotes subalternes qui se sont arrogé le