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CHAPITRE XII.

La seule différence qu’il y ait entre la torture et les épreuves du feu, c’est que la torture ne prouve le crime que si l’accusé veut avouer, au lieu que les épreuves brûlantes laissaient une marque extérieure, que l’on regardait comme la preuve du crime.

Mais cette différence est plus apparente que réelle. L’accusé est aussi peu le maître de ne pas avouer ce qu’on exige de lui, au milieu des tourmens, qu’il l’était autrefois d’empêcher, sans fraude, les effets du feu et de l’eau bouillante.

Tous les actes de notre volonté sont proportionnés à la force des impressions sensibles qui les causent ; et la sensibilité de tout homme est bornée[1]. Or, si l’impression de la douleur devient assez forte pour occuper toute la puissance de l’âme, elle ne laisse à

    la divinité, pouvaient se désunir ou se rompre à chaque instant, au gré des caprices et des frivoles institutions des hommes.

  1. Il fallait dire : « La constance, la patience, la force de souffrir, la résistance à la douleur, » et non pas la sensibilité. « La sensibilité de tout homme est bornée, » signifie qu’il est un degré de souffrance au-delà duquel l’homme ne sent plus rien ; et ce n’est pas ici ce que l’auteur a voulu faire entendre. (Note de Diderot.)