Page:Beckford - Vathek, éd. Mallarmé, 1893.djvu/66

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

guerrier pour se sauver d’un nouveau déluge, mais par l’insolente curiosité de pénétrer dans les secrets du Ciel. Il a beau faire, il ne devinera jamais le sort qui l’attend !

Les génies obéirent ; et, quand les ouvriers élevaient durant le jour la tour d’une coudée, ils y en ajoutaient deux pendant la nuit. La rapidité avec laquelle cet édifice fut construit flatta la vanité de Vathek. Il pensait que même la matière insensible se prêtait à ses desseins. Ce prince ne considérait pas, malgré toute sa science, que les succès de l’insensé et du méchant sont les premières verges dont ils sont frappés.

Son orgueil parvint à son comble lorsqu’ayant monté, pour la première fois, les onze mille degrés de sa tour, il regarda en bas. Les hommes lui paraissaient des fourmis, les montagnes des coquilles, et les villes des ruches d’abeilles. L’idée que cette élévation lui donna de sa propre grandeur acheva de lui tourner la tête. Il