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CONTE ARABE.

s’inclinant avec grace leur dit : mes charmantes princesses, on vous attend ; nous avons dressé les lits de repos, & jonché vos appartemens de jasmin : nul insecte n’écartera le sommeil de vos paupières, nous les chasserons avec un million de plumes. Venez donc, aimables dames, rafraîchir vos pieds délicats, & vos membres d’ivoire dans des bains d’eau de rose45 ; & à la douce lueur des lampes parfumées, nos servantes vous feront des contes. Les sultanes acceptèrent avec grand plaisir ces offres obligeantes, & suivirent la jeune dame dans le harem de l’Emir ; mais il faut les quitter un moment pour retourner au Calife.

Ce prince avoit été conduit sous un grand dôme, éclairé de mille lampes de crystal de roche. Autant de vases de la même matière, remplis d’un sorbet délicieux, étinceloient sur une grande table où se trouvoit une profusion de mets délicats. Il y avoit entr’autres du riz au lait d’amandes, des potages au safran, & de l’agneau à la crême, que le Calife aimoit beaucoup. Il en mangea avec excès, témoigna bien de l’amitié à l’Emir dans la gaîté de son cœur, & fit danser les nains malgré eux ; car ces petits dévots n’osoient désobéir au Commandeur des Fidèles. Enfin,