Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/130

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actuelle il me paraît nécessaire de retirer Phèdre du répertoire de la Comédie-Française (nous en verrons plus loin les raisons), et d'attendre un certain temps avant d'en faire une reprise étudiée.

S'il s'agit, non plus de pièces grecques ou romaines, mais d'une œuvre dramatique dont le sujet a été pris dans le monde contemporain de l'époque où elle a paru pour la première fois à la scène, il faut distinguer si l'œuvre est ancienne ou moderne. Les pièces qui datent d'une époque de l'histoire pour laquelle le temps a fait son office, en créant des types généraux qui sont aujourd'hui à peu près fixes, sont plus faciles à monter parce que déjà ces types ont été réalisés sur la scène et que d'autres arts, la peinture, la gravure et la sculpture, en ont en quelque sorte vulgarisé la connaissance. On a vu cependant, par l'exemple que nous avons cité du Misanthrope, qu'il y a place, même dans ces cas-là, pour des écarts considérables.

La difficulté est quelquefois plus grande pour des œuvres modernes, dans lesquelles il faut précisément réaliser pour la première fois des types qui commencent à se former dans notre esprit, et dans lesquels il y a encore prédominance de traits particuliers, variables dans la mémoire de chacun de nous. Cette question a été justement agitée, récemment à propos de la reprise d'Antony. C'est le cas de remarquer combien il est heureux que toute mise en scène soit de sa nature destructible; car si par impossible on avait conservé celle d'Antony et qu'on nous l'eût remise aujourd'hui sous les yeux, on aurait pu sans