Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/172

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la femme, l'espoir inavoué de toucher peut-être le farouche Hippolyte. Le contraste entre ce costume et celui du premier acte prépare la scène entre Phèdre et Hippolyte, et le jeu comme la diction de l'actrice en reçoivent une animation immédiate. En revêtant ce nouvel aspect, elle en prend le caractère. Ses gestes ne sont plus désormais emprisonnés dans ses voiles, et c'est avec toute la furie d'une femme embrasée des feux de Vénus, qu'après avoir fait au fils de son époux l'aveu de sa coupable passion, ramenée à l'horrible réalité, elle saisira le glaive d'Hippolyte pour le tourner contre elle-même.

Il est étonnant qu'on n'ait pas dès longtemps senti la nécessité des modifications qui s'imposent dans le costume de Phèdre, au premier et au second acte. La raison en est certainement dans une fausse conception du costume tragique. En voulant pousser trop loin l'unité de costume, on crée, comme à plaisir, des contradictions entre l'aspect extérieur des personnages et les sentiments qui les font agir. Or, au point de vue théâtral, de telles contradictions entraînent une diction défectueuse et des gestes qui ne sont pas en situation. Entre l'aspect et le moral d'un personnage, il y a un lien qu'il n'est pas permis de briser; car, au théâtre, prendre l'aspect physique d'un être humain c'est, pour un acteur, disposer son âme à avoir le sentiment de l'état moral du personnage et se rendre capable d'exprimer les passions qui l'agitent.

Si nous nous sommes étendu sur Phèdre, cette tragédie n'est cependant qu'un exemple entre beaucoup