Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/220

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aucune difficulté. Sans doute, la composition du rôle est relativement facile quand la personnalité des personnages est nettement déterminée, comme dans l'exemple que j'ai choisi; mais que le lendemain les deux mêmes comédiens aient à remplir les rôles de Montmeyran et du marquis de Presle, dans le Gendre de M. Poirier, la transition, pour ne pas être brusque, n'en sera que plus délicate; et le spectateur, s'il y pense, pourra commencer à s'apercevoir de toute la difficulté qui préside à la mise en scène d'un rôle. Montmeyran est un militaire comme Raymond; mais le second a fourni une image initiale aux contours un peu secs et tranchants, tandis que le premier se révèle sous les traits d'une image aux angles adoucis. La ressemblance entre les deux sera surtout dans une certaine rectitude morale. Le marquis de Presle est un homme du monde comme Olivier de Jalin, mais avec un peu plus de morgue et de hauteur; il s'est moins usé à tous les contacts de la vie, et il a gardé la part de préjugés qu'Olivier a, dès longtemps, échangés contre une aimable philosophie. Eh bien, ces nuances qui différencient les images initiales de ces rôles, il faut ne pas les laisser perdre; elles doivent se retrouver à tous les moments de l'action, dans toutes les attitudes, dans les moindres gestes, dans la façon d'entrer et de sortir. Que le surlendemain les deux mêmes acteurs reparaissent dans Mademoiselle de Belle-Isle, sous les traits du duc de Richelieu et du chevalier d'Aubigny, voilà encore des images initiales qui sont dans un certain rapport, d'une part, avec le marquis