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Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/229

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unes des autres par des caractères qui, négligés jadis ou habilement fondus dans l'ensemble, s'accusent et prennent un relief inattendu. De là un travail incessant des comédiens pour mettre en saillie ces traits particuliers et spéciaux; de là, la recherche du détail et par suite l'introduction de plus en plus fréquente du réel. Dans la comédie de Molière, pour prendre un exemple, l'argent ne s'est pas encore incarné dans un personnage spécial; mais au XVIIIe siècle nous voyons se dessiner l'image du financier. Aujourd'hui cette image, beaucoup trop générale pour nous, s'est décomposée et nous fournit les images du banquier, de l'agent de change, du quart d'agent de change, du boursier, du coulissier, etc. Ce qui distingue ces personnalités, issues d'une personnalité plus générale, ce sont, non des différences essentielles, mais des différences de surface, des détails pris sur le vif de la société actuelle, des traits de mœurs particulières. L'esprit d'analyse du comédien est obligé de s'affiner; il creuse ses personnages, se met en observation, à l'affût des types particuliers qui se croisent sous ses yeux; et, quand il monte sur la scène, il ressemble souvent à tel que nous venons de coudoyer une heure avant d'entrer au théâtre. Ce n'est plus le portrait à l'huile, peint largement, qui doit la flamme de la vie au tempérament de l'artiste: c'est l'implacable photographie qui fouille les rides, exagère les défauts et grossit les plus charmants détails.

De là, pour le comédien, naît une certaine tendance à