Page:Becq de Fouquières - L’Art de la mise en scène, 1884.djvu/289

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scène devra s'efforcer de ne pas contrarier cette évolution ascendante. On peut donc, conclure que, dans une œuvre dramatique moderne, la mise en scène devra réaliser avec le plus de soin possible tous les tableaux d'exposition, ceux où s'accusent le relatif des idées et des faits ainsi que l'influence des milieux sur les caractères et sur les passions; mais, à mesure que l'action s'approchera du dénouement, elle devra de plus en plus sacrifier, soit dans les décors, soit dans les costumes, soit dans la figuration, les traits particuliers qui faisaient la richesse des premiers tableaux, et peu à peu revêtir un aspect général qui puisse s'harmoniser avec ce qu'a d'absolu et de purement humain l'explosion psychologique et pathologique des passions.

La seconde loi se rapporte, comme nous l'avons dit, à l'influence contingente des milieux. C'est l'aspect multiple et complexe de la vie que l'école cherche à réaliser par l'observation de cette loi. Poussez la porte d'un établissement public quelconque, et dans la foule des êtres humains qui y sont réunis, que de drames et de comédies! Ici un beau drame d'amour va naître, tandis que là une folle comédie se dénoue; dans le groupe prochain un marché honteux se conclut; dans celui-ci un crime horrible se prépare, tandis que dans celui-là s'épanouissent la jeunesse et le bonheur. Une action tragique ou comique ne se développe pas dans le vide, mais elle se meut en traversant des milieux successifs, qui souvent déterminent une modification dans la direction de sa trajectoire.