Page:Bedier - La Chanson de Roland.djvu/165

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transis d’angoisse. Le roi a fait saisir le comte Ganelon. Il l’a remis aux cuisiniers de sa maison. Il appelle Besgon, leur chef : « Garde-le moi bien, comme on doit faire d’un félon pareil : il a livré ma mesnie par traîtrise. » Besgon le reçoit en sa garde, et met après lui cent garçons de la cuisine, des meilleurs et des pires. Ils lui arrachent les poils de la barbe et des moustaches, le frappent chacun par quatre fois du poing, le battent à coups de bûches et de bâtons et lui mettent au cou une chaîne comme à un ours. Honteusement ils le hissent sur une bête de somme. Ainsi le gardent-ils jusqu’au jour de le rendre à Charles.

CXXXVIII

Hauts sont les monts, et ténébreux et grands, les vaux profonds, les eaux violentes. À l’arrière, à l’avant, les clairons sonnent et tous ensemble répondent (?) à l’olifant. L’empereur chevauche irrité, et les Français courroucés et marris. Pas un qui ne pleure et ne se lamente. Ils prient Dieu qu’il préserve Roland jusqu’à ce qu’ils parviennent au champ de bataille, tous ensemble : alors, tous avec lui, ils frapperont. À quoi bon les prières ? Elles ne leur servent de rien. Ils ont tardé, ils ne peuvent arriver à temps.