Page:Bedier - La Chanson de Roland.djvu/283

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épieux se brisent ; alors ils dégainent plus de cent mille épées. Voici la mêlée douloureuse et horrible : qui est au milieu d’eux voit ce qu’est une bataille.

CCXLVI

L’EMPEREUR invoque ses Français : « Seigneurs barons, je vous aime, j’ai foi en vous. Pour moi vous avez livré tant de batailles, conquis des royaumes, dégradé des rois ; je le reconnais bien, je vous en dois le salaire : mon corps, des terres, des richesses. Vengez vos fils, vos frères et vos héritiers, qui à Roncevaux furent tués l’autre soir. Vous le savez, contre les païens j’ai le droit devers moi. » Les Francs répondent : « Sire, vous dites vrai. » Et vingt mille sont autour de lui, qui d’une voix lui jurent leur foi de ne lui faillir pour mort ni pour angoisse : ils y emploieront bien chacun sa lance. Aussitôt ils frappent des épées. La bataille est merveilleusement acharnée.

CCXLVII

ET Malpramis par le champ chevauche. De ceux de France il fait grand carnage. Naimes le duc le regarde d’un regard fier, et va le frapper en vaillant. De son écu il déchire le cuir, de son haubert il rompt les deux pans (?) ; il lui enfonce toute dans le corps son enseigne jaune, et l’abat mort entre les autres, qui gisent sans nombre.