Page:Bedier - La Chanson de Roland.djvu/313

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le roi qu’il proclame Ganelon quitte pour cette fois ; que Ganelon le serve désormais en toute foi, en tout amour. Roland est mort, vous ne le reverrez plus ; ni or ni argent ne le rendrait. Bien fou qui combattrait Pinabel ! » Il n’en est pas un qui n’approuve, hormis Thierry, le frère de monseigneur Geoffroy.

CCLXXVI

VERS Charlemagne ses barons s’en reviennent. Ils disent au roi : « Sire, nous vous en prions : proclamez quitte le comte Ganelon : puis, qu’il vous serve en tout amour et toute foi ! Laissez-le vivre, car il est très haut seigneur… Ni or ni argent ne vous rendrait Roland. » Le roi dit : « Vous êtes des félons. »

CCLXXVII

QUAND Charles voit que tous lui ont failli, il baisse la tête douloureusement. « Malheureux que je suis ! » dit-il. Or voici venir devant lui un chevalier, Thierry, frère de Geoffroy, un duc angevin. Il a le corps maigre, grêle, élancé, les cheveux noirs, le visage assez brun. Il n’est pas très grand, mais non plus trop petit. Il dit à l’empereur, courtoisement : « Beau sire roi, ne vous désolez pas ainsi. Je vous ai longtemps servi, vous le savez. Pour mes ancêtres, je dois parler comme voici. Si même Roland eut des torts envers Gane-