Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/237

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paroles, l’improvisation qu’il préparait depuis trois semaines.

« C’est bon ! c’est bon ! dit Saint-Clair de son air habituel d’insouciante raillerie ; fort bien récité, Adolphe. Veille à ce que les bagages soient mis en place, je reviendrai tout à l’heure à nos gens. » En parlant, il conduisait miss Ophélia au salon.

Pour Éva, elle avait pris son vol jusqu’au petit boudoir qui donnait sur la véranda ; là, une grande femme jaune, aux yeux noirs, était étendue sur un lit de repos ; en apercevant la petite fille, elle se souleva.

« Maman ! cria Éva, se jetant à son cou avec transport, et l’embrassant à plusieurs reprises.

— Assez, assez ! — Prenez donc garde, enfant ! — Vous m’ébranlez toute la tête ! » dit sa mère après avoir languissamment effleuré de ses lèvres le front d’Éva.

Saint-Clair entrait ; il embrassa sa femme, d’une façon plus orthodoxe que tendre, en lui présentant sa cousine, qu’elle accueillit poliment, langoureusement, et avec une nuance de curiosité.

Dans la foule amassée en ce moment à la porte se poussait en avant, toute tremblante d’espérance et de joie, une mulâtresse entre deux âges et d’un extérieur respectable.

« Oh, te voilà, Mamie ! » Et, volant à elle, Éva s’élança dans ses bras, et l’étreignit de toutes ses forces.

La femme ne se plaignit point de sa tête ; loin de là, elle enleva de terre l’enfant qu’elle avait nourrie, la mangea de caresses, et, à demi folle de joie, finit par fondre en larmes. À peine remise à terre, Éva courut de l’un à l’autre, distribuant les serrements de mains, et les embrassades, avec une prodigalité qui, au dire de miss Ophélia, lui tournait sur le cœur.

« Si cela vous arrange, à merveille ! mais vous autres, gens du Sud, vous faites des choses auxquelles, moi, je ne saurais me résoudre.