Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/484

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avancée de la nuit, et touché de l’extrême détresse de deux pauvres femmes auxquelles la force manquait, il se mit à moudre pour elles, ranima les brandons à demi éteints d’un feu, où beaucoup d’autres avaient les premiers fait cuire leurs pains, et ne s’occupa qu’ensuite de son propre souper. C’était chose bien nouvelles, bien étrange en ce lieu-là, et le léger acte de charité éveilla une vibration dans ces âmes engourdies ; une expression affectueuse éclaira leurs figures ; elles pétrirent son pain, en surveillèrent la cuisson ; et Tom, accroupi près du feu, profita de la lueur pour lire quelques mots de sa Bible : il avait tant besoin de consolation !

« Qu’est ça ? demanda une des femmes.

— Une Bible, répondit Tom.

— Seigneur, je n’en ai pas tant seulement vu une depuis que j’ai quitté le Kintuck !

— Avez-vous donc été élevée au Kintuck ?

— Oui, et bien élevée, et soignée aussi, reprit en soupirant la femme ; pouvais pas m’attendre à en venir là !

— Et qu’est que c’est que ce liv’ ? demanda la seconde femme.

— Comment ! mais c’est la Bible.

— Eh Seigneur ! quoi qu’elle dit la Bible ?

— Ce qu’elle dit ? Vous n’en savez rien du tout ? reprit l’autre femme. Oh ! maîtresse m’en lisait quelque fois au Kintuck. Mais, misère ! pour ce qui est d’ici, on n’y entend que menteries et jurons.

— Lisez-nous en un brin, » reprit au bout d’un moment la première femme avec curiosité, en voyant combien Tom était absorbé dans son livre.

Tom lut : « Venez aussi à moi, vous tous qui êtes travaillés et chargés, et je vous soulagerai[1]. »

« Ce sont là de bonnes paroles, approuva la femme ; mais qui est-ce donc qui les dit ?

  1. Saint Mathieu, ch. XI, verset 28.