Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/132

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quand ce héros a laissé lui-même le récit naïf et circonstancié de ses impressions ; quand, de la même main qui grava dans le bronze, comme nous le verrons plus tard, des lamentations dignes de Job, il a tracé jour par jour, sur un papier non moins durable, les moindres détails de son arrivée dans le nouveau monde ? À notre avis, la meilleure histoire de Christophe Colomb, ce serait la collection des écrits de ce grand homme, accompagnée de commentaires, qu’on serait libre de ne pas lire.

Les quelques pages suivantes donneront une idée de ce que serait cette histoire. On y verra en toute ingénuité la somme d’impressions que produisirent l’une sur l’autre deux branches de la race humaine, pour la première fois rapprochées.

« Voulant avant tout, dit Colomb, inspirer de l’amitié aux habitants de cette île, et certain, à les voir, qu’ils se fieraient mieux à nous, et seraient mieux portés à adopter notre sainte foi, si nous usions, pour les y amener, plutôt de douceur que de violence, je donnai à quelques-uns d’entre eux des bonnets de diverses couleurs, et des fils de perles de verre, dont ils se firent aussitôt des colliers. J’y ajoutai d’autres bagatelles qui les firent si joyeux, si reconnaissants, que nous en fûmes dans l’admiration. Dès qu’ils nous virent remontés sur nos embarcations, ils se jetèrent aussitôt à la nage, et vinrent nous offrir des perroquets, du fil de coton, des zagaies et bien d’autres objets encore, en échange desquels nous leur donnions des perles de verre, des grelots et d’autres choses. Ils prenaient tout ce que nous leur donnions et donnaient tout ce qu’ils avaient. Mais ils me parurent extrêmement pauvres en toute chose.