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Les Anglois le nomment en leur language, & les Bretons aussi : mais les François le nomment d’un nom emprunté du language de Flament ou bas Alleman.

XIIII.

Que les Latins mesmes ont plus de mil ans usé de ce nom en leurs escripts, suyvant le vulgaire, pour exprimer le Marsouin.

QUI vouldroit tourner ce nõ de Marsouin, & le rendre Latin, on l’appelleroit Marsio quasi maris sus. Ou si nous le prononciõs Mursouin, ou Marsouĩ on l’appelleroit Mur syo, ou Mor syo. Car mesmement on lict diversement toutes ces deus dictions en Pline, qui au neufiesme chapitre du neufiesme livre, a descrit un poisson qu’il nomme Tursio en ceste maniere. Delphinorum similitudinem habent, qui vocantur Tursyones. Les autres exemplaires ont Torsyones. Et qui auroit changé le T, a une M, l’on prononceroit Mursyones, ou Morsyones, qui seroit a dire Mursoins, ou Morsouins. Or ce que les Latins ont appellé Tursyo, ou Torsyo, ie prouveray bien que les Grecs l’ayent nõmé Phocæna. Laquelle chose Theodorus Gaza n’a pas ignoré, lequel tournant Aristote de Grec en Latin, a receu ceste dictiõ Tirsyo, pour la Greque Phocæna, suyvant l’authorité de Pline. Car tout ce que Pline a escript de Tursyone, Aristote l’avoit dict de Phocæna. Nous parlerons de ce Phocæna ou Marsouin plus amplement en son propre chapitre. Parquoy ie retourneray a mon Daulphin.

XV.

Que le nõ du Daulphin, reste en la memoire des hommes, mais qu’il ne soit point de poisson qu’on cognoisse pour Daulphin.

ET combien que le Daulphin est indiscrettement nõmé Marsouin, & bec d’Oye : ie ne di pas qu’il n’y ait une voix de Daulphin, qui reste imprimee en la memoire des hommes, de laquelle touts se souviennent, & le scavent nommer & cognoistre en peincture & es armoiries, & es monnoyes tant d’or que d’argent,