Page:Belon - L’histoire naturelle des estranges poissons marins.djvu/70

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cartilagineuse s’en va inserer dedens les deux dictes pieces ou lobes des poulmons. C’est par icelle qu’il fait bruire l’eau en respirant, car il l’a iecté en l’air de tres grande roideur en saultant hors de la mer.

II.

A scavoir si le Daulphin & Marsouin sortants hors l’eau viennent en l’air pour respirer, ou pour aspirer.

I’Ay long tẽps esté en doubte voiãt le Daulphĩ & Marsouin venir en l’air scavoir s’ils venoiẽt aspirer ou respirer. Et cõme ceuls qui nouẽt entre deux eaux, ont aspire avãt se mettre en l’eau, & rẽplir leurs poulmõs de vẽt, tout ainsi se peult dire de touts autres animaulx de mer qui ont poulmons, comme Veaux, Tortues, Marsouins, & Daulphins, qu’ils viennent en l’air pour aspirer & reprendre leur haleine. Mais il fault dire qu’ils y viennent pour faire touts les deux : car apres qu’ils ont esté long temps en la mer sans prendre haleine, la chose qu’ils font la premiere est de iecter hors celui vẽt qu’ils avoiẽt porté en la mer, car sortãts hors, on les oit bruyre en iectant du vent & de l’eau en l’air, & fault soubdain qu’ils en reprennent d’autre, car il n’y en ha point en la mer, tellement que qui auroit lié un desdicts animauls au fond de l’eau, il seroit incontinẽt suffoqué par faulte d’haleine. Voila quãt aux instruments de la respiratiõ, & pourquoy l’on veoit tels animaux se monstrer hors l’eau si souvent. Mais encor y ha un autre poĩct digne de plus grande contemplation, qui gist en l’anatomie du Daulphin, & autres poissons cetacees, qui ne peult estre deschifré sans admiration de nature, cõme ie diray en ce suyvãt chapitre.

III.

Que le Daulphin ne se peult repaistre sinon tourné a la rẽverse en prenant l’autre poisson.

CE poinct monstre le grand soing de nature qu’elle ha des animauls qu’elle produict, c’est que ou les autres animauls ont l’artere encontre la gorge, cestuy ci y a le gosier : qui est une chose qu’on peult facilement appercevoir en luy fendant les maschoueres avec un cousteau, & suivant iusques a l’estomach. Car on ne trouvera point de pertuis qui responde a l’artere comme l’on veoit es autres qui ont poulmõs. C’est ce que Aristote avoit voulu