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Page:Belot - Mademoiselle Giraud, ma femme (47e éd.).djvu/11

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MADEMOISELLE GIRAUD

ment, et reconnut en effet Adrien de C…, un de ses anciens camarades à l’école préparatoire de Sainte-Barbe, son compagnon pendant deux années, son voisin de classe et d’études.

Il ne pouvait s’y tromper : c’était bien les mêmes traits réguliers, le même regard doux et à demi voilé, les lèvres minces recouvertes d’une légère moustache. Mais quelle pâleur répandue sur ce visage autrefois coloré, comme il s’était amaigri ! Des rides précoces se dessinaient aux coins de la bouche, les cheveux étaient gris maintenant, et un grand cerne bleuâtre s’étendait sous les yeux. Quinze années avaient-elles suffi pour opérer ce changement et faire un tel ravage ? « Serais-je changé comme lui, » se demanda Camille V… avec effroi.

Il se retourna machinalement vers la glace de la cheminée et reconnut avec un certain plaisir, après un court examen, qu’il n’avait pas vieilli comme son ancien condisciple.

« Et cependant, se dit-il, il n’a pas mené un existence aussi rude, aussi accidentée que la mienne ; il n’a pas couru le monde, souffert de la chaleur et du froid, vécu dans des climats malsains, affronté des tempêtes… »

Il s’arrêta et reprit :