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Page:Belot - Mademoiselle Giraud, ma femme (47e éd.).djvu/248

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MA FEMME

elle-même avait-elle la plus vague idée du pays qu’habitait, en ce moment, celle qui seule au monde avait assez d’autorité sur son esprit pour l’éloigner du droit chemin ?

Plein de confiance dans une destinée meilleure, persuadé que mon sort dépendait de moi et que mes rêves, longtemps caressés, ne tarderaient pas à se réaliser, je n’étais plus nerveux et impatient comme autrefois ; mon amour était plus reposé. Il se métamorphosait même en quelque sorte : j’en arrivais à ne voir dans Paule qu’une enfant malade que j’avais mission d’élever et de guérir.

Je m’étais épris de ma tâche, comme un médecin s’éprend d’un client condamné par ses confrères et qu’il espère sauver ; comme l’aumônier d’une prison s’attache au criminel que ses exhortations ont convaincu et que le repentir a touché. Mon amour devenait plus immatériel : j’avais moins de désirs et plus de tendresse.

Paule semblait vivement pénétrée de mes soins et de mes délicatesses ; elle m’en remerciait souvent par un sourire, un regard ou un serrement de main. Je crus même remarquer qu’elle devenait un peu coquette avec moi, sans doute par esprit d’opposition.

Vous le voyez, cher ami, je touche au but et vous ne