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Page:Belot - Mademoiselle Giraud, ma femme (47e éd.).djvu/7

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MADEMOISELLE GIRAUD

qui sépare la chaussée des maisons ; un des battants d’une porte cochère s’ouvrait devant eux, et un petit nègre en livrée leur montrait silencieusement le vestiaire, au rez-de-chaussée à gauche.

Au bout d’un instant, les hommes en habit noir, les femmes en dominos de toutes les nuances, avec des loups sur le visage, gravissaient un escalier à rampe sculptée. Arrivés dans un premier salon, ceux-ci se dirigeaient, pour le saluer ou lui serrer la main, vers un personnage de quarante-cinq à cinquante ans, grand, mince, distingué, portant toute sa barbe, une barbe blonde très-connue dans le monde parisien. Celles-là, pendant ce temps, rejoignaient un jeune homme qui se tenait à l’entrée du salon, échangeaient un signe avec lui, murmuraient un nom, soulevaient un bout de masque, et s’étant fait ainsi reconnaître, se faufilaient dans une grande galerie, toute tapissée de toiles précieuses et déjà pleine des amis de la maison.

On aurait pu se croire au foyer de l’Opéra une nuit de bal, mais à l’Opéra d’autrefois, celui dont nos pères gardent le souvenir, à l’époque où l’on savait encore causer. rire et s’amuser sans turbulence ni scandale, où l'intrigue florissait, où les femmes du monde n’étaient pas exposées