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Page:Belot - Mademoiselle Giraud, ma femme (47e éd.).djvu/72

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MA FEMME

les idées les plus arrêtées : elle pensait sans doute qu’un mari pouvait se donner la peine de mériter sa femme, et qu’il était délicat à lui de paraître oublier ses droits. Dans l’intérêt de notre amour, elle voulait se faire désirer et m’appartenir comme amante, avant de devenir ma femme. Elle trouvait, en un mot, qu’il y avait quelque chose d’injuste et d’illogique à exiger qu’à jour fixe, en sortant de la mairie, une jeune fille se jetât dans les bras d’un homme qu’elle connaissait à peine, et elle avait résolu de se soustraire à cette coutume barbare.

Voilà, mon cher ami, les raisonnements que je me faisais pour expliquer la conduite de Paule ; seulement je me disais qu’elle aurait dû me laisser deviner sa manière de voir ; j’aurais disposé de toute autre façon notre appartement et fait l’acquisition d’un second lit, en vue de mon célibat prolongé. Peut-être aussi ne se rendait-elle pas parfaitement compte de la façon dont je passais mes nuits, et était-il prudent de lui donner une légère idée de ce canapé de salon, fort étroit et peu rembourré, devenu depuis deux jours ma couche nuptiale, ou antinuptiale.

— Cette vue la touchera, me disais-je, et lui inspirera