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Page:Belot - Mademoiselle Giraud, ma femme (47e éd.).djvu/77

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MADEMOISELLE GIRAUD

trer chez une femme un peu de savoir dire et de savoir faire, et s’il leur arrive de songer au mariage, vous les trouverez souvent assez disposés à épouser une veuve.

Aussi me surprenais-je peu à peu à me féliciter de voir chez Paule les avantages incontestables de la jeune fille, réunis à une certaine expérience précoce due à des conseils intelligents ou à une intuition particulière de la vie.

Cette position de soupirant faite à un mari avait aussi quelque chose d’original et développait mon imagination qui, l’avouerai-je, avait un peu sommeillé jusqu’à ce jour. Je crois que si j’étais tombé sur une jeune fille ordinaire, j’aurais fait, d’accord avec mon tempérament calme et une certaine dose d’apathie propre à mon caractère, un mari des plus prosaïques et des plus bourgeois.

Auprès de Paule, au contraire, tout mon être s’éveillait. et je sortais peu à peu de cette léthargie des sens causée chez moi par les travaux excessifs auxquels je m’étais livré depuis l’enfance. Mon intelligence toujours surmenée, mon esprit sans cesse tendu vers des études trop abstraites, ne m’avaient point permis de compter avec mon cœur ; il battait pour la première fois peut-être, et j’étais ravi de le sentir battre.