Page:Beltjens - Nox, 1881.djvu/10

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Sous l’Etna qui l’écrase on croit voir Encelade,
Rassemblant les tronçons de ses membres broyés,
Pour tenter vers le ciel sa seconde escalade,
Réveiller du sommeil les Titans foudroyés.

Et du fond ténébreux de sa forge en démence,
S’avancent les deux bras monstrueux d’un géant
Qui saisit le Soleil dans sa tenaille immense
Et, tout en feu, le plonge au fond de l’Océan.

Et tout redevient noir, et la Nuit gigantesque
D’un pôle à l’autre étend ses ailes de corbeau ;
Et la lune, à travers l’obscurité dantesque,
Laisse errer la lueur de son morne flambeau.

Et dans mon âme aussi, brisé par la souffrance,
Je sens tomber le soir de l’arrière-saison,
Et ton dernier soleil, chère et douce Espérance.
Disparaître à jamais derrière l’horizon.

Maintenant que je touche au sommet de la vie,
Qui dans l’or du matin m’apparaissait si beau,
De cette cime à pas si pénibles gravie,
Je n’aspire à plus rien qu’à descendre au tombeau.