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Si tu vois sous les vents l’assiégeant par cohortes
Tes rêves les plus chers déchirés en haillons,
S’en aller loin de toi comme des feuilles mortes
Que l’autan furieux emporte en tourbillons ;

Si le monde insensible au fardeau qui t’oppresse
N’offre plus de refuge à tes pas isolés ;
Si plus rien ne répond à ta noire détresse
Que le lugubre écho de tes cris désolés ;

Si, trahi par les tiens, étendu sur la terre,
Rassasié de fiel, même par l’amitié,
Sans espoir, implorant le rocher solitaire
Et la ronce des bois de te prendre en pitié,

Tu gis là palpitant, avec la mort dans l’âme,
De tout secours humain morne déshérité,
Du poignard dans ton cœur n’enfonce point la lame…
Pleure et résigne-toi, car tu l’as mérité,

Mais, me répondras-tu, quelle est ma forfaiture ?
Du denier de la veuve ai-je donc trafiqué ?
Ai-je à tromper la foule assisté l’imposture ?
Contre le vrai, le juste ai-je prévariqué ?