dant nous nous mîmes encore une fois en route ; mais arrivant auprès de la maison du Kakia-Bey, je sentis mon courage faillir à la vue de tant de Turcs, et je balançai d’entrer. Je demandai enfin au Mamelouk ce qu’il répondrait dans le cas où on lui demanderait qui j’étais ; il dit qu’il répondrait que j’étais un Turc anglais. J’étais habillée en mamelouk ; prenant tout mon courage j’entrai sans autre crainte, que celle d’être reconnue par les Turcs pour femme. Ce n’est pas qu’il m’eussent molestée ; mais leur curiosité m’aurait importunée.
Après avoir traversé une grande cour, j’entrai dans une petite chambre où Abdalla le chef était assis ; il paraissait très-fatigué. Le pacha avait envoyé sa voiture au-devant de lui ; mais ils avaient eu soin de le charger de chaînes pesantes. Il avait l’air d’un homme de vingt-huit à trente ans ; sa physionomie était très-expressive et intéressante ; peut-être sa situation me la faisait-elle paraître ainsi. Il avait un frère dont l’extérieur était celui d’un paysan ordinaire ; celui-là parlait à tous les Turcs, surtout à ceux qui appartenaient à la mosquée ; il voulait leur faire croire qu’il n’avait jamais combattu contre eux comme son frère. Après que nous eûmes regardé Abdalla quelque temps, on nous fit tous sortir pour faire