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ANTOINE DÉCHAÎNÉ

mon affaire à Me Campinchi) discutera devant eux les questions de droit : cuisine dont un humble mortel ne saurait se mêler. Mais… il n’y a pas que le droit : un écrivain a des « raisons » qu’un tribunal ne connaît pas. Messieurs, voici les miennes !

« On prétend que ma manière a été diffamatoire : je réponds que je n’avais pas le choix entre plusieurs manières. Mon sujet s’imposa. Je me devais de le traiter comme j’ai fait. J’avais décidé un portrait d’Antoine. Le présenterais-je sous la forme d’un roman ? d’un récit à clefs ? d’un récit sans clefs ? — Un roman ? Appeler Antoine Floridor et généraliser un type qui vaut par ses particularités ? C’est manquer le but. — Un récit à clefs ? Pour attirer l’attention ? J’ai le dégoût de la réclame. — Il me fallait donc prendre mon modèle sur le vif, ainsi que l’ont fait de tous temps les auteurs de mémoires.

« Mon personnage central bien décidé, même question se pose pour les comparses et le sujet. Le sujet, je ne saurais le changer. J’ai fait le voyage d’Arles. Ce sera de l’Arlésienne que je parlerai, non… de Pêcheur d’Islande.

« Mais une artiste joue l’Arlésienne : faut-il changer ses traits ? Je l’observe et je remarque que le trait