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ANTOINE DÉCHAÎNÉ

visiter Antoine, comme on aspire, par les jours étouffants de l’été, à voir des huées prometteuses d’air et de mouvement.

Il reste chaque dimanche chez lui pour recevoir. Une pièce pour les amis, claire et chauffée l’hiver, une seconde pour les raseurs plus sévère et sans feu, et il va de l’une à l’autre, expédiant ceux-ci, s’attardant près de ceux-là, à moins que soudain, s’imposant à soi-même une sorte de pénitence, il ne subisse volontairement le discours d’un importun. Il se met à l’épreuve pour voir un peu. Il s’enferme avec le fâcheux, qui est dans le ravissement. Doux, résigné, Antoine écoute. Il approuve, il sourit. On l’attend ; il ne revient plus. Quand tout à coup, les amis à côté entendent une explosion. C’est Antoine qui éclate ! Est-ce que l’indiscret a été trop loin ? Il se croyait pourtant triomphant, mais le voici noyé dans un débordement de rage, tel qu’Antoine seul en peut avoir. Le pauvre, terrifié, prend la fuite ; une porte claque ; Antoine reparaît.