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GRANDGOUJON

les deux hommes s’y glissèrent. Grandgoujon trébucha.

— Sale terrain !

— Ou fichus pieds ! reprit l’autre. Tu trembles ?

— Sais pas, redit sincèrement Grandgoujon. Quelle race de saligauds !

Croqueboche abruti, mais insensible aux explosions, suivait toujours.

Le boyau tournait. À un tournant, ils le trouvèrent comblé.

— Ça, dit Laboulbène, c’est l’œuvre d’un pépère. Hisse ! Escaladons !

— Dieu de Dieu ! soupira Grandgoujon.

Et à la minute où ils émergeaient du boyau, quelque machine infernale éclata dans le champ, tout près.

Grandgoujon s’aplatit, ventre et nez sur terre, puis il ne bougea plus. L’homme de Cahors en avait fait autant, il était blême aussi, mais il fut vite debout, puis crânant :

— Eh ! l’oiseau ! Serais-tu tué ?

Grandgoujon leva la tête :

— Il… s’en est fallu de peu !

— Mais il s’en faut toujours de peu ! Tes père et mère se sont rencontrés : un peu plus ils se manquaient !

— Quelle existence ! larmoya Grandgoujon, se relevant. Si ma mère me voyait…

— Ta mère ! dit Laboulbène, elle verrait qu’à toi seul tu fais des trous de marmites ! Regarde.

Poids lourd, Grandgoujon venait de se mouler dans le sol humide, et sa trace restait en entonnoir.