Page:Benjamin - Grandgoujon, 1919.djvu/222

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
224
GRANDGOUJON

les affections de poitrine, et le poumon, ai-je besoin de vous le dire, est d’une autre importance vitale que les intestins.

Le jeune médecin ricana :

— Digérant mal, vous pouvez vous prolonger. Si vous ne respirez plus, c’est le grand voyage à bref délai. Monsieur, j’ausculte vos poumons, et pour l’instant, c’est net : pas assez d’air.

— Diable de diable ! reprit Grandgoujon sujet, dans l’étonnement, à ces répétitions machinales.

— Venez-vous du front ?

— J’en arrive.

— Ah ! ah ! Et vous avez été bombardé ?

— Terriblement, docteur !

— Eh bien voilà ! Vous êtes ce que nous appelons un « comprimé », un pelotonné. Au point de vue émotif, vous demeurez dans l’état où vous vous trouviez lorsque venait une marmite. Vous êtes crispé, Monsieur, et ne respirez plus librement.

— Oh ! ça, ne put s’empêcher de dire Grandgoujon, c’est très curieux : car c’est exactement ce que j’éprouve. Docteur, vous m’analysez d’une manière remarquable !

— Donc, aucune aérophagie.

— Docteur, je ne faisais que répéter…

— Monsieur, mon prédécesseur était excellent, mais dans son genre. Je vais essayer, moi, de rétablir en vous une circulation normale, tout en équilibrant votre système nerveux. Comme mobilisé, maintenant, que faites-vous ?

— Rien. « Indisponible ».