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GRANDGOUJON

ainsi, puisqu’il y en eut une autre, hélas ! un temps trop bref…

Il salua.

— Je ne vous demande plus qu’une petite signature.

Grandgoujon s’empressa de la donner, après quoi il reconduisit son visiteur avec la plus attendrie reconnaissance.

Pendant ce temps, la sœur bataillait avec Mariette pour disposer d’une façon convenable la chambre de la morte. Comme Grandgoujon revenait, la sœur dit aigrement :

— Elle ne veut pas que je mette une rose dans la main de Madame Grandgoujon !

— Oh ! pourquoi ?… dit douloureusement Grandgoujon.

Et le désir de la sœur devint une étrange réalité.

Dès qu’il y a un cadavre dans une maison, les esprits des vivants se surexcitent autour. Ces pauvres humains ne sont jamais prêts à cette catastrophe normale. Ce ne sont alors que luttes, discussions, mots aigres-doux dans les pièces voisines, et aussi c’est un débarquement de parents et d’amis qui, comme si la Mort, et Dieu derrière, les entendaient, découvrent tout à coup leur âme au naturel, font avec éclat l’étalage de leur conscience, se réclament de ce qui est digne et respectable en ce monde, enflent le service le plus modeste du vent de leurs revendications.

Ce rôle, à l’enterrement de Madame Grandgoujon, fut joué par sa nièce, dont il n’a pas encore été question dans ce récit qui se passe à