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Page:Benjamin - Le Major Pipe et son père, 1918.djvu/24

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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

J’ai mes livres, un ou deux amis ; ça me suffit bougrement !

Mais elle pinçait les lèvres et s’aigrissait.

Pourtant elle restait avide de mettre en valeur ce mari trop mou : elle avait besoin que Barbet fût distingué, choisi, honoré. La nouvelle du voyage en Angleterre l’épanouit.

Elle était redevenue presque amoureuse lorsqu’elle se laissa embrasser, et Barbet, tout de suite, sentit quelle joie il ferait à son orgueil de femme en lui apprenant qu’il allait là-bas à la place d’un autre. Avec un confrère, il se fût humilié par cette indication. Sa femme s’écria : « Bravo ! Raconte : qui devait y aller ? »

— Le patron, reprit Barbet, a dit à cette espèce d’officier qui était là, un type fatigué, nerveux, incapable d’écouter : « Je ne peux vous donner que Barbet » ; puis il a cligné de l’œil : « Vous ne perdrez pas au change ! »

— Je le crois, fit sa femme.

Elle s’assit, croisa les jambes.

— Quand pars-tu ?

— Après-demain.

— Qui te reçoit ?

— Le Gouvernement.

— Qui est-ce qui paye ?