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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

Evelyn le suivait des yeux, des yeux de vingt ans, d’une pureté qui firent songer à Barbet, malgré sa violente colique :

— Elle est capable de l’aimer ! Il n’est pas gêné de s’offrir des tendrons qui ont trente ans de moins que lui ! Ah ! le sauvage !

C’était sa colique, surtout, qui sauvagement le ravageait. Il se tournait sur sa chaise, sans force pour avaler, quand M. John Pipe, de plus en plus gai, commença de lui décrire le château d’Hampton-Court, q’il l’allait mener voir.

— Tout rouge briques dans le verdure, il vous plaira bien, mongsieur Bâbette ! Et on voit, dans l’intérieur, une cour avec gazones, bassines, et grands fenêtres du siècle précédent qui sont réservées pour les veuves d’amirals… Oh ! ce est une délice ! Mais le chose émouvant, ce était, au dehors, une petite jardine où nous resterons, si vous aimez, avec de grosses pavés dedans les allées, puis une Vénus, des fleurs potagères, tout simple et beau… Oh ! mongsieur Bâbette, jardine française, jardine pleine de goût, et au-dessus le ciel il souffle les nuages et bénit toutes choses qui poussent, et l’air y circule bien heureux, et l’homme il sent son cœur rafraîchi.