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Page:Benjamin - Le Major Pipe et son père, 1918.djvu/81

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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

vingt mètres et dont la seule couleur était de la vie.

On eût dit un espoir qui naissait et marchait, à travers des espaces désespérés ; mais la teinte farouche et sauvage de cette grande voie britannique faisait songer aussi au feu et au sang des combats. Il y avait, dans cette route, de la beauté et de l’horreur ; elle annonçait et elle rappelait ; et elle avait l’air d’apporter un commencement de paix, mais elle était effroyablement rouge de la guerre.

Et c’est là que James Pipe dit à Barbet :

— Voulez-vous, mongsieur Bâbette… nous déjeunions maintenant ?

— Mais… si vous avez faim…

Il avait grand faim.

Il sortit les sandwichs, puis, avec allégresse, il mordit dans le plus gros.

Barbet soupira : « Tout de même, comment peut-on vivre ici ! »

Cette idée mit James Pipe en joie. La bouche pleine, dansant sur ses pieds, il dit :

— Si mon père il vous entendrait, je crois il serait heureux, car il a un cœur pareil à vous.

Il remordit dans son sandwich.

— Mon père est l’homme le plus bon, mais il