Morhange aussi était un autre enfant. Mais, réveillé avant moi, il avait eu le temps sans doute de se familiariser avec chacun des détails dont le fantastique ensemble m’écrasait.
Posant sa main sur mon épaule, il me contraignit doucement à revenir dans la salle.
— Vous n’avez encore rien vu, — dit-il. — Regardez ; regardez.
— Morhange, Morhange !
— Eh ! mon cher, que voulez-vous que j’y fasse ? Regardez !
Je venais de m’apercevoir que l’étrange salle était meublée — Dieu me pardonne — à l’européenne. Il y avait bien, de-ci, de-là, des coussins touaregs, ronds, en cuir violemment bariolé, des couvertures de Gafsa, des tapis de Kaïrouan, des portières de Caramani que j’aurais, en cet instant, frémi de soulever. Mais un panneau, entr’ouvert dans la muraille, laissait apercevoir une bibliothèque bondée de livres. Aux murs était accrochée toute une série de photographies représentant les chefs-d’œuvre de l’art antique. Il y avait enfin une table qui disparaissait sous un invraisemblable amoncellement de papiers, de brochures, de livres. Je crus m’effondrer en apercevant un numéro — récent — de la Revue Archéologique.
Je regardai Morhange. Il me regarda, et soudain un rire, un rire fou, s’empara de nous, nous secoua une bonne minute.
— Je ne sais pas, — put enfin articuler Morhange, — si nous regretterons un jour notre petite