Page:Benoit L Atlantide.djvu/222

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Les Touareg blancs du service particulier d’Antinéa étaient, certes, peu communicatifs. Les femmes n’étaient guère plus loquaces. Je savais, il est vrai, par Sydya et Aguida, que mon compagnon aimait bien les grenades, ou qu’il ne pouvait souffrir le kouskous aux bananes. Mais, dès qu’il s’agissait d’avoir un renseignement d’ordre différent, elles prenaient la fuite dans les longs couloirs, effarouchées. Avec Tanit-Zerga, c’était bien autre chose. Cette petite paraissait avoir une sorte de répulsion à évoquer devant moi le moindre fait se rapportant à Antinéa. Elle était pourtant, je le savais, dévouée comme un chien à sa maîtresse. Mais elle gardait un mutisme obstiné si je venais à prononcer son nom, et, par répercussion, celui de Morhange.

Quant aux blancs, il ne me plaisait guère d’interroger ces sinistres fantoches. D’ailleurs, tous trois s’y prêtaient peu. L’hetman de Jitomir sombrait de plus en plus dans l’alcool. Ce qui lui restait de raison, il semblait qu’il l’eût liquidé le soir qu’il avait évoqué pour moi sa jeunesse. Je le rencontrai de temps en temps dans les couloirs devenus soudain pour lui trop étroits, fredonnant d’une voix pâteuse un couplet de l’air de la Reine Hortense :

De ma fille Isabelle
Sois l’époux à l’instant,
Car elle est la plus belle
Et toi le plus vaillant.