Page:Benoit L Atlantide.djvu/226

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duits ici par Cegheïr-ben-Cheïkh, tous, sauf un, quand ils ont vu Antinéa, n’ont plus essayé de s’échapper.

— Les garde-t-elle longtemps ?

— Cela dépend d’eux et du plaisir qu’elle y trouve. Deux mois, trois mois, en moyenne. Cela dépend. Un grand officier belge, taillé comme un colosse, n’a pas fait huit jours. Par contre, tout le monde se rappelle ici le petit Douglas Kaine, un officier anglais : elle l’a gardé près d’un an.

— Et puis ?

— Et puis, il est mort, — fit la vieille, comme étonnée de ma question.

— De quoi est-il mort ?

Elle eut le mot de M. Le Mesge :

— Comme tous les autres : d’amour.

« D’amour, — continua-t-elle. — Ils meurent tous d’amour, quand ils voient que leur temps est fini, et que Cegheïr-ben-Cheïkh part pour en chercher d’autres. Plusieurs sont morts doucement, avec aux yeux de grosses larmes. Ils ne dormaient ni ne mangeaient plus. Un officier de marine français est devenu fou. Il chantait, la nuit, un triste chant de chez lui qui résonnait dans toute la montagne. Un autre, un Espagnol, était comme enragé ; il voulait mordre. Il a fallu l’abattre. Beaucoup sont morts du kif, un kif plus violent que l’opium. Quand ils n’ont plus Antinéa, ils fument, fument. La plupart sont morts ainsi… les plus heureux. Le petit Kaine est mort autrement.

— Comment est mort le petit Kaine ?