Page:Benoit L Atlantide.djvu/87

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déteint ; et c’était un homme indigo que Morhange était en train de rappeler à la vie.

Lorsque je lui eus administré un quart de rhum, il ouvrit les yeux, nous dévisagea tous deux avec surprise, puis les ayant refermés, murmura, en arabe, d’une voix à peine intelligible, cette phrase dont nous ne devions comprendre le sens que quelques jours plus tard :

Se peut-il que je sois arrivé au terme de ma mission !

— De quelle mission veut-il parler ? — dis-je.

— Laissez-le revenir tout à fait à lui, — répondit Morhange. — Tenez, ouvrez une boîte de conserve. Avec des gaillards de cette trempe, on ne doit pas observer les précautions prescrites pour nos noyés européens.

C’était en effet à une espèce de géant que nous venions de sauver la vie. Le visage, quoique très maigre, était régulier, presque beau. Le teint était clair, la barbe rare. Les cheveux déjà blancs révélaient un homme d’une soixantaine d’années.

Quand j’eus déposé devant lui une boîte de corn-beef, un éclair de joie vorace passa dans ses yeux. Cette boîte renfermait bien les portions de quatre solides mangeurs. Elle fut vidée en un clin d’œil.

— Là, — dit Morhange, — voilà un robuste appétit. Nous allons maintenant pouvoir poser nos questions sans scrupule.

Déjà, le Targui avait ramené sur son front et sur son visage le voile bleu rituel. Il fallait même qu’il fût bien affamé pour n’avoir pas accompli