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PRÉFACE

« Je changerai volontiers, dit-il, pourvu qu’on me donne du retour. »

L’évêque fut surpris de ce mot chez un enfant de cet âge, et répondit qu’on devait lui laisser un nom qu’il semblait si bien faire valoir.

À douze ans, Benserade perdait son père et se trouvait, du même coup, seul au monde et sans fortune. Il vint faire ses études à Paris, mais ses classes étaient à peine achevées que le précoce poëte, négligeant la Sorbonne pour le théâtre, s’amourachait d’une certaine Belroze, actrice de l’hôtel de Bourgogne, et y faisait recevoir une tragédie en cinq actes.

C’était sa Cléopâtre, imprimée en 1636[1], et dédiée à Monseigneur l’Éminentissime cardinal, duc de Richelieu, avec une épître fort bien tournée et un sonnet où Cléopâtre parle, et qui débute ainsi :

 
Je reviens des enfers d’une démarche grave.
Non pour suivre les pas d’un César, mais d’un Dieu,
Ce que je refusois de faire pour Octave
Ma générosité le fait pour Richelieu.

Qu’il triomphe de moy, qu’il me traite en esclave,
Rien ne peut m’empécher de le suivre en tout lieu.
Et le char d’un vainqueur si puissant et si brave
Mérite qu’une Reine en soutienne l’essieu.


Le ministre fut flatté de la dédicace du poëte de

  1. Ménage cite la pièce comme faite en 1630, et dit à ce propos que Benserade était auteur plus que jubilé.