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XVII
PRÉFACE

parole, s’écriaient : Cela est délicieux ; qu’a-t-il dit ?

Ses bons mots, ses épigrammes, ses pointes, comme on disait alors, étaient dans toutes les bouches et se transmettaient comme choses sur lesquelles on n’aurait su trop s’extasier.

Ce fut à peu près vers 1651 que les deux sonnets de Voiture et de Benserade partagèrent la cour et la ville, les salons et l’Académie. Toutes les pièces rassemblées de ce petit procès littéraire formeraient certainement plusieurs in-folio.

Voiture venait de mourir en 1648, et son sonnet à Uranie avait été recueilli par ses amis comme le dernier soupir de sa muse. Le sonnet de Job parut, et voilà la guerre civile du bel esprit allumée.

Le sonnet de Benserade fit fureur ; tout ce qu’il y avait d’amoureux à la mode, tous les languissants et les mourants du jour, trouvèrent admirable de peindre ainsi son martyre :


Il souffrit des maux incroyables,
Il s’en plaignit, il en parla :
J’en connois de plus misérables.


Le sonnet de Voiture se présentait avec un tout autre caractère.

« Il était de l’élégance la plus parfaite, dit Victor Cousin[1], un peu molle il est vrai, mais relevée, et

  1. La Jeunesse de Madame de Longueville, par V. Cousin, Paris, Didier, 1853.