Page:Bentzon - Le Roman d’un muet, 1868.djvu/108

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viné ma présence — s’arrêter sur moi, tout invisible que je fusse, ce regard plein de langueur et de promesses, ce regard profond, énigmatique, ingénu tout ensemble, qui m’avait une fois déjà rendu fou. Je saisis la rampe pour m’élancer vers elle ; rien de plus aisé ; il n’y avait sur le jardin que sa chambre et le salon… Tout à coup je pensai à ce vieillard qui dormait là, tranquille et confiant, si sûr de mon honneur qu’il avait remis le sien, celui de son enfant, à ma merci, et l’idée d’une trahison m’humilia jusqu’au fond de. l’âme. — En même temps la lampe s’éteignait ; les élans de tout mon être se perdirent dans un morne accablement ; je me laissai tomber plutôt que je ne descendis à terre et m’enfuis sans me retourner, comme l’homme chassé du Paradis perdu.