Page:Bentzon - Le Roman d’un muet, 1868.djvu/31

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

m’avait nommé : — le muet ! Un salut embarrassé, une ridicule pantomime d’excuse, et on me laissait seul, — toujours seul ! Du moins, dans nos grands bois déserts de N*** je n’avais pas de pareils combats à soutenir.

Séparé par l’activité de la vie sociale du seul ami que j’eusse, mon frère, je songeai enfin que l’aspect des choses inanimées, de la nature extérieure qui ne m’avait jamais traité en marâtre, valait mieux pour moi qu’un monde où j’étais condamné au rôle éternel de spectateur, et je pris la résolution de retourner à N… Mon père la trouva fort sage. Je me rappelle encore l’air de soulagement avec lequel il me vit partir en compagnie de Furey. Celui-ci ne me pardonna jamais d’avoir interrompu un aride travail sur la géologie de la Genèse, qu’il poursuivait à la Bibliothè-