Page:Bentzon - Le Roman d’un muet, 1868.djvu/46

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d’une croisée, je regardai tandis que les autres écoutaient. Comme ses doigts couraient légèrement sur le clavier ! La tête renversée de telle sorte que ses prunelles limpides disparaissaient presque sous la frange des paupières, elle semblait évoquer quelque dieu invisible qui descendit amoureusement vers elle. Laure me tournait le dos, mais chaque fois qu’elle rejetait en arrière par un mouvement du col, ondoyant comme celui d’un beau cygne, les lourdes masses de ses cheveux, je voyais avec surprise ce profil de marbre s’éveiller à l’émotion, son sein se soulever et s’abaisser avec la nuée de mousseline qui le couvrait, ses lèvres trembler sur un éclair de nacre, de moites clartés baigner son front ; elle daignait soupirer, s’attendrir, être femme, mais une femme si