Page:Bentzon - Le Roman d’un muet, 1868.djvu/47

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divinement belle que je craignais à chaque instant qu’un souffle supérieur ne l’emportât dans les cieux. C’était sainte Cécile et c’était Corinne, ou plutôt la muse elle-même. Je ne saurais décrire ces dix minutes courtes comme une seule, et qui renfermèrent l’éternité. Je rêvai ce que je ne pouvais entendre ; j’empruntai des comparaisons aux splendeurs du soleil, aux lueurs du crépuscule, à l’infini étoilé, au flux solennel de la mer, à la fraîche influence de la rosée. Parfums, poésie, lumière, tout ce que je connaissais déjà de doux et de terrible et mille autres sensations innommées, se fondirent pour moi dans une ivresse qui, comme celle du hatchich, embrassait également l’âme et la matière et que j’appelai le chant. Je ne m’étonnai plus, me sentant frappé de ce souffle mystique, qu’il eût, aux