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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

du piau, du mal z’yeux, du thiac, de toutes les maladies nègres des petits poulets ; une fois même sa maîtresse dut lui ouvrir la phalle, le jabot, afin d’en tirer une pierre qu’il n’avait pas pu digérer. Grâce à cette infatigable sollicitude, le petit poulet devint une poule pondeuse émérite. Sa première couvée, vendue par la petite fille, lui permit d’acheter un cabri, la seconde une truie, la troisième une brebis. La première portée du cabri, jointe à celle de la brebis, permit d’acheter une génisse, puis une autre vache ; bref, la poule pondant toujours, la chèvre, la truie et la brebis ayant toujours des petits, les vaches donnant d’excellent lait, la petite fille acheta ceci et cela, ce qui finit par aboutir à une fortune de cinq cent mille livres coloniales (deux cent mille francs à peu près).

« Eh bien ! disait Yette à sa da, en écoutant ces merveilles, quand je serai aussi riche que cette petite fille-là, je te donnerai tout, puisque c’est toi qui t’entends le mieux à soigner mes bêtes. Mais je ne les aime pas parce qu’elles me rendront riche, je les aime parce qu’elles sont gentilles et qu’elles sont à moi. »

Volontiers aussi Yette accompagnait sa mère dans ses visites de charité au petit village que les