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Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/314

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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

tirait de leur cachette des patrons découpés, de la gaze, des rubans. Jusqu’à l’aube ses mains diligentes taillaient, garnissaient, cousaient, posant ici un nœud, là une fleur, complétant enfin la plus simple mais la plus fraîche des toilettes de jeune fille. Le matin la retrouvait pelotonnée dans son lit pour mieux tromper Cora, mais, de fait, elle ne dormit pas pendant près d’une semaine. Aussi, la veille du bal, avait- elle si mauvaise mine, que sa sœur, inquiète de la voir malade, ne pensait plus du tout à la grande question des chiffons.

« Si nous essayions cette fameuse robe blanche », dit enfin Yette quand elle eut terminé sa tâche.

Cora, fort tristement, alla chercher la robe de mousseline, repassée tant bien que mal par Mesdélices.

« Ce n’est pas celle-là que je te demande ! » dit Yette.

Et, triomphante, elle étala son œuvre, un vrai nuage blanc floconneux et semé de petites bruyères roses. Mesdélices vint admirer, s’extasier, rire et sauter avec ses maîtresses d’aussi bon cœur que si la jolie toilette eût été pour elle-même.

« Et toi ? dit tout à coup Cora dont l’ivresse